Bac 2020 : les oubliés de septembre

Aujourd’hui commence la session de septembre du bac 2020 pour quelques dizaines de milliers de candidats. Ces candidats, ce sont les oubliés de la grande braderie du mois de juin. Les exclus de la neutralisation complaisante du troisième trimestre. Les privés de l’évaluation généreuse du contrôle continu généralisé.
Ils sont les seuls à se présenter au bac comme si le coronavirus n’avait jamais existé, les seuls  à avoir révisé durant l’été des épreuves maintenues à leur intention exclusive, les seuls à avoir dû  travailler le programme complet de l’année, les seuls abandonnés par un ministère pressé de renoncer à un bac appelé à disparaître.

Une très grande injustice

Ces candidats, qui sont-ils ? Dans leur immense majorité1, ce sont des jeunes qui n’ont pu poursuivre une scolarité régulière dans un établissement, des jeunes qui souffrent depuis des années de problèmes de santé ayant rendu leurs études chaotiques, des garçons et des filles qui, contre leur gré, n’ont pu grandir à côté d’autres garçons et filles dans des classes et des CDI, des enfants courageux contraints d’être scolarisés à la maison, réduits au dévouement et à l’ingéniosité de leurs parents, dépendants de l’investissement de professeurs compréhensifs, et, ironie du sort, ce sont ces jeunes, candidats libres plus par obligation que par choix, à l’écart du système régulier, qui sont depuis ce jour les seuls à passer le dernier bac régulier.
Il y a là une très grande injustice, une inégalité d’autant plus choquante qu’elle touche des jeunes gens fragiles au moment même où les discours jurent la plus grande attention, les plus grands secours aux personnes dites vulnérables (et qui l’étaient bien avant le virus), une inégalité d’autant moins républicaine qu’elle porte atteinte au mérite, d’autant moins démocratique qu’elle produit deux groupes distincts de bacheliers jugés sur des critères différents.
Ces élèves auraient pourtant mérité autant de clémence que leurs camarades « normaux », mais, dans notre société, c’est bien connu, les difficultés attirent les difficultés, et les malades inspirent parfois plus de rejet que de bienveillance. C’est pourquoi ce cri de « justice », il faudrait l’entendre poussé partout pour toutes celles et ceux qui passent aujourd’hui leur épreuve de philo, demain d’histoire-géo, jusqu’à la dernière matière écrite, le 10 septembre.
Pour ces candidats, la session de septembre n’a rien d’une session de rattrapage. C’est pourtant ce qu’elle devrait être pour le ministère : l’occasion de se rattraper, l’occasion de tendre la main, l’occasion de ne pas quitter ce bac sur un scandale.

Pascal Caglar

1 À côté de cette majorité d’élèves à la scolarité empêchée, ajoutons le droit exceptionnel accordé aux recalés de juin de repasser leur bac, donnant à ces derniers deux chances d’obtenir l’examen, là où les candidats « libres » par nécessité n’en auront qu’une seule.

Pascal Caglar
Pascal Caglar

2 commentaires

  1. Bravo Pascal pour cette prise de position .. Les sujets sont ” normaux” et portent la date de juin 2020… Covid ou pas la machine Education Nationale fonctionne à l”économie . Amitiés . Odile

  2. Entièrement d’accord avec votre article, nous candidat libre subissons une énorme injustice et inégalités des chances.

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