Parcoursup 2025 :
vers plus de transparence
et moins d’imprévus

La semaine du 2 juin a marqué une étape importante dans le cursus de plusieurs milliers de néo-bacheliers avec les résultats d’admission de Parcoursup. C’est l’heure du bilan de la plateforme au prisme de cette session 2025.

Par Ludmilla Soron, étudiante à Sciences Po Paris

Pour la première année peut-être depuis sa création en 2018, les critiques faiblissent contre Parcoursup. Les premiers résultats sont tombés le lundi 2 juin : 66% des lycéens ont reçu au moins une proposition d’admission le premier jour, contre 64,8 % en 2024, et la plateforme d’orientation post-bac est enfin plus accessible pour les élèves de terminale, leurs parents et l’équipe enseignante. Depuis cette année, l’élève bachelier peut procéder à une simulation de ses chances d’admission pour la formation souhaitée. En entrant ses notes de première et de terminale, il peut comparer son dossier à celui des étudiants admis les années passées. La donnée « résultats scolaires » n’est certes pas absolue, mais les notes comptent beaucoup dans un grand nombre de formations.

Sans être d’une fiabilité extrême, le simulateur permet probablement d’éviter d’entrer trop de vœux d’orientation risqués, en privilégiant la carte de la sécurité. À ce titre, bon nombre d’enseignants recommandent de concilier des vœux « réalisables » et un ou deux vœux « de rêve » pour former un dossier équilibré, maximisant ainsi les chances de l’élève d’obtenir une réponse positive à l’issue de la procédure. Les bonnes statistiques de cette édition 2025 confirment cette stratégie de sécurité. Pour rappel, la procédure d’admission s’étend jusqu’à la fin de l’été, et de nombreuses propositions d’admission devraient tomber dans les semaines à venir pour les lycéens actuellement placés sur liste d’attente.

Le simulateur présente aussi l’avantage d’être honnête sur les véritables attendus des formations quant à leurs futurs admis. L’éternel débat sur le choix de conserver ou non la spécialité mathématiques est ainsi résolu pour beaucoup de formations : l’élève est fixé d’office sur ses faibles chances d’être accepté s’il n’a pas suivi cette spécialité en terminale. C’est une occasion, d’ailleurs, de requestionner la pertinence de la réforme du lycée, qui vantait le choix offert aux jeunes de suivre une « spécialité de cœur » en dépit des attendus prioritaires du supérieur qui se fixent sur les anciennes filières S, ES et L. Or, l’orientation des élèves est souvent perçue comme dépendant de choix stratégiques effectués au lycée, avec une survalorisation des enseignements scientifiques. Ainsi, en 2023, le pourcentage d’élèves abandonnant la spécialité « mathématiques » en terminale a continué de décroître (41 % en 2021, 38 % en 2022 contre 33 % en 2023). En parallèle, une hausse des abandons de l’enseignement d’HGGSP (histoire-géographie, géopolitique et sciences politiques) est notée (30 % en 2023 contre 26% en 2022). Le même constat est réalisable pour la spécialité SES (sciences économiques et sociales, conservée par 36 % des élèves de terminale en 2022 contre 34,7 % en 2023) ou la spécialité LLCER (langues, littératures et cultures étrangères et régionales, 18,9 % en 2022 contre 18,2 % en 2023).

Sur le plan esthétique, la plateforme Parcoursup est plus attrayante que les versions précédentes. La possibilité d’ajouter des formations parmi ses favoris est un avantage supplémentaire qui évite une perte de temps considérable. Enfin, le renforcement de la transparence est indéniable par rapport aux attendus du jury qui fixe de façon beaucoup plus systématique les pourcentages d’importance de telle ou telle compétence (notes de spécialités, attitude en classe, activités extrascolaires…)

Zones d’ombre sur les classements

Cependant, des zones d’ombre demeurent quant aux données effectivement utilisées par Parcoursup pour classer les candidats. À titre d’exemple, si la mention du lycée d’origine n’est techniquement pas censée influer la décision du jury, plusieurs filières l’utilisent pour favoriser la mixité sociale dans la composition de leurs promotions. Ce critère permet de « diversifier les recrutements », estime Alain Joyeux, président de l’Association des professeurs des classes préparatoires économiques et commerciales (APHEC), interrogé par L’Étudiant le 4 juin 2024.

À l’inverse, les universités revendiquent le refus d’utiliser le lycée d’origine dans leur évaluation. Problème : à l’heure du contrôle continu et de la disparité de notation entre les établissements, force est de constater que les bulletins scolaires ne se valent pas entre les lycées. Dans son rapport de 2020, la Cour des comptes suggérait ainsi « d’anonymiser » le lycée d’origine et de lui « substituer une mesure de l’écart entre les résultats au baccalauréat et la notation au contrôle continu ».

Le format actuel du baccalauréat pose ainsi un problème puisque les formations n’ont pas de réel critère objectif d’évaluation, si ce n’est une (sur)focalisation sur les résultats aux épreuves anticipées de français. Thomas, élève de terminale, a reçu lundi 2 juin ses premiers résultats Parcoursup. Bon élève, d’un profil plutôt scientifique, il aspirait à intégrer des prépas MPSI (mathématiques, physique et sciences de l’ingérieur) sélectives. « J’avais 16/17 en physique et 16 en maths. Concernant les prépas, j’ai eu plusieurs refus pour les plus sélectives, et pour les prépas un peu moins cotées je suis aussitrop loin en liste d’attente. C’est une vraie déception. » Le jeune homme n’a eu que 8/20 et 9/20 au bac de français. Ces résultats ont probablement joué en sa défaveur.

Seule note objective du cursus, en dehors du contrôle continu, les formations post-bac accordent en effet une importance majeure aux épreuves anticipées de français. Les élèves ont conscience de cet enjeu. Ils ne font pas forcément preuve d’un même engouement pour les épreuves de terminale placées en concurrence avec la procédure d’orientation qui est l’enjeu phare de cette dernière année de lycée.

Si on ajoute à cela la moindre importance des lettres de motivation, d’un format trop court et formel pour être réellement décisif, les procédures d’admission restent fondées sur les résultats scolaires. Le nombre exponentiel de lauréats du baccalauréat chaque année (91,4 % d’admis en juin 2024) induit une réelle sélection à l’entrée dans les études supérieures du fait d’un ratio insuffisant entre le nombre de places offertes et le nombre de candidats. Ce qui pose question, au-delà de Parcoursup, sur le format du baccalauréat actuellement et sur la nécessité de repenser l’orientation.

Vers une année de découverte ?

Interrogé à ce sujet quelques heures à peine avant les premiers résultats de Parcoursup, le ministre de l’Enseignement supérieur, Philippe Baptiste, annonçait son souhait de réformer en profondeur l’orientation des lycéens dans les prochaines années. Parmi les pistes envisagées, la création année d’une de transition facultative pour les élèves hésitants sur le choix d’un cursus. Perspective intéressante, quoique délicate à mettre en place. En effet, ce format largement plébiscité dans le monde anglo-saxon n’a pas d’ancrage actuellement dans le système français.

Aux États-Unis, le modèle du Bachelor (équivalent de la licence) est réalisé en quatre ans, dont une année de découverte et d’exploration des différentes disciplines autour de deux diplômes principaux : le Bachelor in Arts ou le Bachelor in Sciences qui ouvrent ensuite les portes des écoles spécialisées (médecine, droit), ainsi que des masters et des doctorats. L’idée pourrait donc permettre à un nombre non négligeable d’étudiants de prendre le temps de la réflexion avant de se lancer dans des études universitaires.

Pour autant, une telle réforme suppose un chamboulement massif de l’université et introduit des débats : quelle poursuite d’études à l’issue de la première année, et, le cas échéant, quelles équivalences ? Quelle formation, et comment l’homogénéiser à l’échelle nationale ? Par ailleurs, la proposition ne résout pas le problème du manque de places dans l’enseignement supérieur face à la hausse continue du nombre de bacheliers candidats.

Une plus grande inclusion

De surcroît, des progrès vers une plus grande inclusion des élèves issus de tous les milieux socio-professionnels sont aussi attendus. On sait aujourd’hui que les lycées favorisés fournissent la grande majorité des effectifs des cursus « élitistes » (classes préparatoires, médecine…) tandis que les élèves de milieux populaires sont beaucoup plus vulnérables à l’autocensure dans leur choix d’orientation.

Le secteur associatif joue un grand rôle dans l’accompagnement de ces élèves au cours de leurs années lycée et dans la procédure Parcoursup. Les formations elles-mêmes devraient sans doute intervenir afin de recruter leurs futurs talents. À titre d’exemple, Sciences Po Paris propose, via la convention éducation prioritaire (CEP), une procédure distincte du recrutement « classique » pour les lycées affiliés, situés dans des zones d’éducation prioritaire.

De plus, un meilleur accompagnement des élèves des lycées d’outre-mer est aussi indispensable. Éloignés géographiquement des écoles situées en métropole, il est parfois délicat pour les parents et les enfants d’avoir accès à une information de qualité et de préparer au mieux la première année d’études supérieures.

Le plus difficile reste la recherche d’un logement en métropole et l’adaptation pour ces étudiants d’outre-mer, complexifiée par la distance. Dans une interview pour le CIDJ en 2019, plusieurs étudiants confiaient leurs dilemmes et leurs inquiétudes face à la rupture brutale avec leurs proches provoquée par l’éloignement géographique, et l’autonomisation expresse qu’il convient d’acquérir lorsqu’on vit seul à des milliers de kilomètres de ses proches.

Ces dernières années, de nombreuses associations étudiantes se sont développées afin d’intégrer au mieux les nouveaux arrivants, à l’image de Mozaik Outre-Mer, Sciences O ou Solidarités Dom Tom. À noter que, le 2 juin dernier, 10 564 élèves réunionnais ont obtenu une proposition d’admission sur Parcoursup.

La réflexion autour de l’orientation des jeunes ne peut être menée avec une vision uniquement court-termiste, à l’échelle de la licence. La création de la plateforme Mon Master, il y a deux ans, et les écueils affiliés nécessitent de clarifier les poursuites d’études possibles pour les différentes formations et de revaloriser les études plus courtes comme les BTS. Celles-ci permettent à leurs diplômés d’accéder plus facilement au monde professionnel, ce que l’immense panel d’études fourni par l’université ne garantit pas toujours.

Longtemps perçues comme un synonyme de réussite sociale, les études universitaires ne sont pas le seul gage d’accès à un emploi stable et à une source de revenus. L’université n’est pas adaptée à tous les profils, et le taux d’échec en première année (52,2 % à la rentrée 2021) est un indicateur fort de la nécessité d’accompagner les jeunes en leur déployant la diversité des possibilités, à partir de la classe de troisième.

L. S.


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Ludmilla Soron
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