80e anniversaire du débarquement
et de la Libération :
enjeux de mémoire, devoir d’histoire

Le 6 juin 1944, des centaines de soldats américains ont débarqué sur la plage d’Omaha Beach et ensanglanté les eaux de la Manche, tandis que des milliers de soldats anglais, canadiens ou français arrivaient sur d’autres plages. Le 80e anniversaire du débarquement est l’un des temps forts de cette année marquée par des célébrations historiques.
Par Alexandre Lafon, historien et professeur d’histoire (académie de Toulouse)

Le 6 juin 1944, des centaines de soldats américains ont débarqué sur la plage d’Omaha Beach et ensanglanté les eaux de la Manche, tandis que des milliers de soldats anglais, canadiens ou français arrivaient sur d’autres plages. Le 80e anniversaire du débarquement est l’un des temps forts de cette année marquée par des célébrations historiques.

Par Alexandre Lafon, historien et professeur d’histoire (académie de Toulouse)

Le 6 juin prochain, une grande partie du monde a rendez-vous sur la plage d’Omaha Beach en Normandie pour célébrer le 80e anniversaire du débarquement de Normandie. Le même jour, sur la même plage, 80 ans auparavant, des centaines de soldats américains ont posé leurs rangers sur le sable de France, ensanglantant les eaux tumultueuses de la Manche. Au même moment, ce sont des milliers de soldats anglais, canadiens ou français (les 177 hommes du commando Kieffer) qui tentaient sur d’autres plages proches de prendre pied sur le continent.

Au soir du 6 juin 1944, 156 000 soldats alliés touchent terre en Normandie (133 000 par mer, 23 000 par les airs). Les pertes humaines, selon les secteurs de débarquement, s’élèvent à 1,4 % à Utah, 1,7% à Gold, 3,35 % à Juno et 2,2 % à Sword, à l’exception du secteur d’Omaha (7 %), le plus touché. Les Alliés déplorent ainsi 10 000 morts, blessés ou disparus. Le débarquement est un succès tactique, stratégique, au bilan humain militaire bien moindre que celui attendu. À partir du 6 juin, les Alliés réussissent à créer une solide tête de pont en Normandie.

Lors de ses vœux à la Nation le 31 décembre 2023, le président de la République, Emmanuel Macron, a fait de ces commémorations un des temps forts de l’année 2024, susceptible de placer la France en pleine lumière à l’échelle mondiale. Avec les Jeux olympiques et la réouverture de Notre-Dame de Paris, 2024 devrait donc être un « millésime français », sous le signe de la mémoire et de l’histoire en train de s’écrire.

La panthéonisation de Mélinée et Missak Manouchian en février 2024, et avec eux des étrangers de la Résistance magnifiés (a posteriori) par la célèbre « affiche rouge », constituait le premier acte mémoriel associé à l’histoire française de la Seconde Guerre mondiale. Le riche cycle commémoratif 2024 et 2025 portant sur « le 80e anniversaire des débarquements, de la Libération et de la Victoire » a débuté officiellement le 16 avril 2024 lors d’un hommage au maquis du Vercors. À l’image du long cycle du centenaire de 2013-2019, cette nouvelle pierre angulaire de la politique mémorielle du chef de l’État a pour ambition de ressouder la société française « autour des valeurs républicaines de liberté, d’égalité et de fraternité ». La mémoire ici convoquée n’a d’intérêt que pour servir le présent cabossé d’une société fissurée. Elle doit servir également les intérêts du pays à l’échelle internationale, dans un monde ultra connecté et très interdépendant.

C’est aussi l’occasion, au-delà de la rhétorique communicationnelle et des agendas politiques, de faire un point sur l’histoire de ces années de fin de guerre, sans omettre de zones sombres, et de comprendre les enjeux mémoriels à l’heure de 2024, en soulignant la nécessité de faire histoire.

Histoire : débarquement de Normandie et Libération

Entre 1942 et 1943, l’Alliance contre les pays dits de l’Axe (Allemagne, Japon et Italie essentiellement) s’accélère. Le débarquement réussi en Afrique (opération Torch de novembre 1942), puis en Italie (juillet 1943 avec 160 000 hommes sur les côtes siciliennes), signe de grands succès militaires, qu’accompagne la reddition d’une armée allemande après des mois de combats terribles à Stalingrad. Décidé lors de la conférence de Téhéran, fin 1943, par les trois principaux alliés contre l’Axe, à savoir Theodore Roosevelt (États-Unis), Joseph Staline (URSS) et Winston Churchill (Royaume-Uni), le débarquement en Europe du Nord a pour objectif d’ouvrir un nouveau front, de soulager l’allié soviétique et d’impliquer les « démocraties » dans la libération du joug nazi. Le débarquement est donc attendu par les populations européennes et par… l’armée allemande. Elle s’efforce de consolider ses positions sur les littoraux en armant davantage ce qu’on appellera le mur de l’Atlantique.

Mais où le débarquement aura-t-il lieu ? Les autorités alliées procèdent par élimination : la Scandinavie ? Trop loin de la base arrière britannique. Les Pays-Bas ? Des plages trop étroites. L’Atlantique ? Trop attendu. Il restait le Pas-de-Calais ou la Normandie. Cette dernière région offre des plages plus larges et moins défendues. Ce sera donc entre Barfleur et Ouistreham que les troupes, massées et entraînées pour l’occasion en Angleterre, débarqueront début juin.

Le débarquement, reculé à plusieurs reprises à cause du mauvais temps, est précédé de puissants bombardements sur les principales villes côtières comme Le Havre ou Cherbourg. Des troupes aéroportées sont déployées à l’arrière des plages pour faciliter les opérations, alors que la résistance française s’emploie en parallèle à affaiblir les communications allemandes (destruction ou sabotage de voies ferrées, de ponts, de lignes téléphoniques).

Cette pluralité des acteurs impliqués dans l’événement se retrouve dans le film monument de 1962 intitulé The Longest Day ou Le Jour le plus long en français (Twentieth Century Fox). Le titre est inspiré d’une phrase prononcée par le général Rommel, commandant l’armée allemande dans le nord-ouest de la France lors du débarquement. En pleine guerre froide, la critique présente ce film comme hyperréaliste par rapport à l’histoire du Jour-J… ce qu’il n’est pas tout à fait. Il s’agissait, à travers le 6 juin, de magnifier le « monde libre » allié contre l’oppression. Au début des années 1960, l’ennemi n’est alors plus l’Allemagne (dont les chefs militaires sont peu égratignés), mais l’URSS communiste et ses satellites.

Si le débarquement du 6 juin est un rapide succès, la bataille de Normandie qui s’engage est beaucoup plus incertaine. L’armée allemande se renforce rapidement d’unités venues de partout en France. Les divisions SS dont la Das Reich, rapatriées du sud de la France, seront à l’origine d’importantes exactions et massacres, comme à Tulle, à Limoges ou à Oradour-sur-Glane.

Entre juin et juillet 1944, les combats dans le bocage normand du Calvados et du Cotentin sont très durs. La prise de Caen à la mi-juillet se solde par des centaines de tués du côté américain et britannique. Cherbourg tombe, et ensuite la route de la Seine débouche sur Paris, libérée le 25 août en partie par des unités françaises blindées du général Leclerc, avec l’aide des résistances (communistes ou gaullistes).

Paris brûle-t-il ?, la super production filmique franco-américaine de René Clément (1966 – Paramount Picture), revient sur cet épisode marquant de l’histoire française de la Seconde Guerre mondiale. Le général de Gaulle a su mettre en scène la libération de la capitale (remontée des Champs-Elysées, discours à l’Hôtel de ville) qui jouira en 2024 d’événements commémoratifs idoines.

Entre-temps, les troupes françaises, largement issues des colonies d’alors, ont débarqué en Provence le 15 août, ouvrant un nouveau front au sud du pays, alors que Staline lance une grande offensive à l’Est. Le Comité français de libération nationale, constitué en 1943, devient Gouvernement provisoire de la République qui prend en main les pouvoirs et l’administration de la France. Résistance et France libre fusionnent et participent comme alliés à la libération de l’Europe. Il faudra attendre début 1945 pour voir l’ensemble du territoire national libéré, après les difficiles succès des armées alliées dans les Ardennes.

Mémoire : un lieu de souvenir à l’échelle nationale, européenne et mondiale

La mémoire de l’événement s’inscrit dans des logiques très contemporaines. Le cycle commémoratif 2024-2025 relève en particulier de plusieurs enjeux associés à une politique volontariste. L’histoire nous apprend que, depuis toujours, la mémoire est un outil de gouvernement. Elle est utilisée notamment à des fins de conservation du pouvoir (mise en valeur de la puissance du monarque ou du régime politique en place) ou de valorisation identitaire (celle de la communauté, de la patrie, de la Nation). Elle appuie au présent les valeurs portées par le groupe. Comme le souligne l’historien Pierre Nora, « la mémoire installe le souvenir dans le sacré ». Évolutive, elle se transforme au gré du contexte présentiel et justement des attentes des sociétés et des pouvoirs, mais également des enjeux géopolitiques du moment.

Une mise en mémoire évolutive du débarquement

Dès les lendemains du débarquement, l’événement devient un enjeu mémoriel. Sa mise en récit s’articule autour de quelques idées clés : le débarquement a permis l’ouverture d’un second front majeur en Europe, la libération rapide de la France et de la Belgique. Comme principaux alliés et dans un contexte de guerre froide, les États-Unis et les Britanniques visent à magnifier la mémoire du D-Day face à la conquête soviétique. Car ce sont bien les Soviétiques qui ont libéré la plus grande partie du continent européen (80% des pertes allemandes à l’Est).

Durant les années 1960, le film Le Jour le plus long participe de cette valorisation, mettant en scène par la même occasion le mythe gaullien d’une résistance française « majoritaire » et efficace. Les travaux historiens ont montré pourtant à partir des années 1970 combien la résistance nationale fut mince. La France participe à cristalliser le Jour J comme une date marquante du conflit passé : les cérémonies se multiplient sur place et prennent de plus en plus d’importance ; musées et mémoriaux fleurissent comme le musée d’Arromanches, inauguré en 1954 par le président Coty. Par la suite, le général de Gaulle préfère honorer le débarquement franco-français de Provence, celui de la France libre qu’il dirigea. Il s’agit alors de montrer l’indépendance de la France (qui sort de l’Otan en 1967) face au monde anglo-américain.

Il faut attendre 1984 pour observer un changement majeur. La crise des euromissiles pousse les Alliés occidentaux à réaffirmer leur unité. Il faut se souvenir de la poignée de main qui a eu lieu cette même année entre François Mitterrand et Helmut Kohl à Douaumont, sur l’ancien champ de bataille de Verdun. Avec la disparition progressive des témoins, le politique peut emporter la partie. Ce sera le cas de François Mitterrand qui investit durablement la politique mémorielle du pays et en particulier le débarquement de Normandie. Sept chefs d’État, dont le président américain et la reine d’Angleterre, participent aux cérémonies du 40e anniversaire, alors que le président français est le seul à prendre la parole. Il est question d’Europe et de paix sur le continent. C’est un tournant essentiel qui installe le 6 Juin durablement dans la mémoire collective des Français. Les commémorations ne cesseront ensuite de prendre de l’ampleur. En 2004, pour une première, le chancelier allemand Gerhard Schröder est invité, comme le président russe Vladimir Poutine. Le premier affirmant « que la période de l’après-guerre est définitivement terminée ». Dix ans plus tard, la mémoire des civils victimes est honorée (plus de 20 000 ont péri dans le sillage du débarquement du 6 Juin, si peu évoqués dans la première phase mémorielle de l’événement).

En parallèle, le film de Steven Spielberg Il faut sauver le soldat Ryan (DreamWorks – 1998) fait passer le débarquement de Normandie dans la sphère de l’entertainment (divertissement), tout en restaurant la violence guerrière au cœur de l’événement, longtemps édulcorée dans la mémoire et l’histoire (ce que dénonce l’historien Paul Fusell dans À la guerre en 1992).

À l’aube de la mort des derniers vétérans, le film a valeur d’hommage aux soldats, mais également aux valeurs contemporaines portées par la première puissance mondiale. Quid du débarquement de Provence ? Inscrit en plein week-end largement chômé du 15 août, son souvenir pâli, attaché aux troupes coloniales sous couleur de la France Libre.

Le film Indigènes réalisé par Rachid Bouchareb en 2006 souligne les problématiques mémorielles d’un débarquement porté par une France colonialiste et dénonce le traitement inique des soldats coloniaux par la métropole durant et après la guerre. La Provence moins que la Normandie donc, cette dernière appuyée durablement sur une mémoire internationale et positive des « soldats de la liberté ».

Le développement d’un tourisme de champ de bataille

La mémoire du champ de bataille est entretenue par différents acteurs à partir de 1944. Un Comité local du Débarquement, soutenu par l’État, prend rapidement en charge les premières commémorations. Elles s’appuient peu à peu sur un tourisme mémoriel fondé sur la visite de vastes cimetières et nécropoles et plus de 40 musées, dont le Mémorial de Caen qui ouvre ses portes en 1988. Il est aujourd’hui le phare culturel et historien du champ de bataille.

Les commémorations ne revêtent plus seulement un caractère de souvenir, mais bien un levier de développement du territoire. La région Normandie a mis en place le contrat de destination « Tourisme de mémoire en Normandie », qui vise à fédérer les acteurs touristiques du territoire et à positionner la Normandie comme la destination internationale par excellence sur la Seconde Guerre mondiale, autour des valeurs de paix et de réconciliation (à l’image du champ de bataille de Verdun). Depuis 2018, la Fabrique de patrimoines en Normandie, organe territorial de valorisation patrimoniale locale, est partenaire du projet européen Atlantikwall Europe, visant à mettre en valeur les vestiges du Mur de l’Atlantique à travers l’Europe.

Les autres partenaires principaux sont des structures belges et néerlandaises, avec un coordinateur belge employé par l’Union européenne. Le projet cherche à mettre en contact les différents sites et structures préservant des vestiges de ce premier mur européen. Les commémorations sont donc aujourd’hui autant des marqueurs d’une mémoire commune à l’échelle européenne et mondiale que porteuses d’enjeux économiques locaux et nationaux, pour les territoires de l’ancien champ de bataille et pour la part du PIB dévolu au tourisme mémoriel.

Politique de mémoire : la Mission Libération

Afin d’accompagner ce temps fort mémoriel, qui s’est peu à peu construit depuis 1945, l’État a mis en place en septembre 2023 une mission dite Libération sur le modèle de la Mission du Centenaire (d’ailleurs localisée à Paris dans les mêmes locaux !). Elle est chargée de préparer et de coordonner les manifestations associées au débarquement et à la Libération. « Le programme visera à honorer ceux qui se sont levés, ceux qui ont souffert, et ceux qui ont combattu et libéré », souligne le communiqué de presse accompagnant sa mise en place.

Deux axes : la valorisation de la France à l’international en travaillant avec les pays dont la mémoire est associée à la Seconde Guerre mondiale ; la valorisation à toutes les échelles « des valeurs républicaines de liberté, d’égalité et de fraternité. ». Un garde-fou historien : un conseil scientifique et d’orientation présidé par un des principaux spécialistes français du conflit, Denis Peschanski.

La mémoire du passé pour le présent

La politique de mémoire actionne deux leviers devenus traditionnels : dans un premier temps, la mémoire partagée à l’échelle européenne ou mondiale doit servir l’image de la France à travers la valorisation de son patrimoine, de son savoir-faire touristique, de la mise en œuvre de grandes cérémonies commémoratives. Réunir des ennemis le temps d’une commémoration, c’est montrer le savoir-faire diplomatique du pouvoir en place. La question de la présence russe, américaine ou chinoise le 6 juin 2024 est donc un enjeu propre. La mémoire est un outil de Soft Power (puissance d’influence non violente) assumé.

Dans un second temps, la mémoire, ici du débarquement et de la Libération, est utilisée comme réarmement de valeurs politiques communes qui fondent l’unité nationale. Face aux clivages socio-économiques forts, face aux doutes et aux dissensions politiques, face aux menaces du monde, une cérémonie réussie et une dynamique territoriale inclusive et positive peuvent aider à soutenir un vivre-ensemble interrogé. La proximité de la commémoration internationale du 6 juin et des élections européennes n’échappe pas au chef de l’État. Il saura mobiliser un discours d’appel au vote et valoriser son action européenne, alors qu’il sera face aux chefs d’État du continent.

Dans une logique « d’équilibre des mémoires », la Mission Libération s’applique enfin à travailler avec les collectivités locales placées « en première ligne », comme la région Normandie ou PACA, l’Île-de-France pour la libération de la capitale, l’Alsace et Strasbourg, les plus importants territoires nationaux de la Résistance, du Vercors au Limousin. La mémoire locale ainsi valorisée s’inscrit dans une histoire nationale plus large. 

Des commémorations pour la jeunesse

« L’engagement de la jeunesse » apparaît comme un des enjeux les plus importants du cycle. La mémoire des jeunes résistants, militaires ou victimes du nazisme est convoquée pour instruire la jeunesse d’aujourd’hui. Comme jadis les exploits chevaleresques des temps anciens étaient censés éduquer les jeunes nobles à leur condition. C’est une forme d’usage politique du passé : il doit éclairer de jeunes générations, tentées sans doute par le repli, le consumérisme ou l’attentisme.

Derrière ce commode paravent, il est sans doute possible pour les enseignants de trouver des problématiques bien plus profondes. Le riche enseignement pédagogique de la Mission du Centenaire, publié dès 2019[1], saura guider les équipes pour investir ce territoire de la commémoration hors de l’injonction étatique. En particulier d’aiguiser l’esprit critique de leurs élèves. Les établissements scolaires peuvent déposer des dossiers spécifiques de labellisation et ainsi, proposer des projets pédagogiques s’appuyant sur les grandes dates commémoratives (débarquement du 6 juin, libération de Paris ou de Strasbourg, débarquement de Provence par exemple), tout en mettant en lumière les événements très locaux. Entrer dans la commémoration par le biais d’un questionnement critique spécifique sur les mémoires (comment se souvenons-nous ? Pourquoi nous souvenons-nous ?), sur la médiatisation de l’événement (en France et dans d’autres pays, comment sont présentées les commémorations ?), sur les productions artistiques d’envergure (pourquoi telles œuvres à telle époque ?) permet d’impliquer rapidement les élèves dans des recherches, des questionnements utiles à la formation citoyenne. L’interdisciplinarité est en particulier adaptée à la mise en œuvre de projets de mémoire ou d’histoire, parce qu’elle mobilise la « boîte à outil » citoyenne : langues, histoire, géographie, arts ou sciences soutiennent ensemble la formation d’une même conscience au monde qui sait mettre à distance par l’observation, l’analyse comparée, la critique.

Les commémorations sont l’occasion de convoquer une ou des mémoires largement instrumentalisées au présent. Ce sont donc des moments privilégiés pour déconstruire avec les élèves les strates empilées de discours performatifs, pour entrer dans un régime de vérité, celui de l’histoire.

Ce travail de va-et-vient entre mémoire et histoire paraît salutaire, comme le souligne dans ses travaux Denis Peschanski, spécialiste de l’une et de l’autre. L’historien Pierre Nora rappelle pour sa part que, si la mémoire est sacrée, « l’histoire, parce qu’opération intellectuelle et laïcisante, appelle analyse et discours critique[2]». Elle est le meilleur rempart face aux manipulations dont la mémoire est bien trop souvent victime.

A. L.

Séquence pédagogique associée : Alexandre Lafon, « Le D-Day (jour-J): 6 juin 1944, de la mémoire à l’histoire », 3 juin 2024

Un site : https://www.defense.gouv.fr/mission-liberation

Un livre : Olivier Wieviorka, Histoire du débarquement en Normandie. Des origines à la libération de Paris 1941-1944, Paris, Seuil, 2007.


Notes

[1] Alexandre Lafon, Bilan pédagogique du Centenaire, réseau Canopé, 2019.
[2] Pierre Nora, Les lieux de mémoire, Paris, Quarto-Gallimard, 1984-1992, introduction du vol. 1, p. 25.


L’École des lettres est une revue indépendante éditée par l’école des loisirs. Certains articles sont en accès libre, d’autres comme les séquences pédagogiques sont accessibles aux abonnés.

Alexandre Lafon
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