Résultats du nouveau bac 2020 : l’usage de la calculatrice serait autorisé

À mes élèves de Première.

Les élèves de Première des séries générale, technologique et professionnelle ont été confrontés dès le mois de septembre aux subtilités de la réforme du baccalauréat ; ils ont dû saisir la proportion de contrôle continu (« Mais alors, tout compte ? »), comprendre les modalités des nouvelles épreuves dont l’acronyme semblait contradictoire avec la passation (« Mais pourquoi ça s’appelle des E3C si c’est une épreuve et pas un contrôle continu ? »), découvrir avec leurs professeurs de nouveaux programmes et de nouveaux objectifs pédagogiques, s’accoutumer à travailler dans des groupes qui n’étaient plus constitutifs d’une classe, mémoriser l’architecture inédite de leur scolarité en même temps qu’ils devaient apprendre de nouvelles connaissances…

Et c’était beaucoup pour les élèves, c’était beaucoup pour les professeurs, c’était beaucoup pour les équipes de direction et c’était beaucoup pour les parents d’élèves, et le premier trimestre n’a pas toujours suffi pour que chacun puisse se faire une représentation à peu près exhaustive de ce que la réforme supposait.


L’épidémie de Covid-19 a bouleversé l’année scolaire ; par le confinement de la population elle a transformé l’enseignement en télé-enseignement avec ses péripéties, parfois ses absurdités, souvent ses belles surprises, et les différents acteurs de l’École ont appris à communiquer autrement, à échanger autrement, à se comprendre autrement et à ne pas se comprendre autrement, car tout cela ne va pas sans tension et sans heurt.

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Dans la page qu’il consacre au brevet et au baccalauréat, le Ministère écrit qu’au regard des incertitudes sur les évolutions de la situation sanitaire, la perturbation dans l’apprentissage des élèves et la complexité d’organisation de nos examens nationaux, « il n’est pas possible, comme l’a dit le Premier Ministre le 2 avril, que les élèves puissent passer le baccalauréat dans les conditions normales ».
Et la page de dérouler, pour les classes de Troisième, de Première et de Terminale les aménagements des examens nationaux, leurs conséquences pratiques et leurs effets comptables.
Pour les élèves de Troisième et pour les élèves de Terminale, l’affaire est entendue : l’ensemble des épreuves du diplôme national du brevet et du baccalauréat général, technologique et professionnel sont validées à partir des notes du livret scolaire.
C’est clair, c’est net, c’est précis ; mais à la clarté et à la netteté de ce principe général il y a une exception : l’épreuve orale du baccalauréat de français est maintenue.
Les élèves de Première n’ont pas de chance, décidément. Après avoir affronté les arguties de la réforme que chacun expliquait à sa manière, ils se retrouvent dans une situation singulière, sinon même étrange, qui relève de ce qu’on appelait autrefois au Certificat d’études une épreuve de calcul ; que voici.

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Imaginons que Camille soit élève de Première générale et que ses trois spécialités soient « Sciences économiques & sociales », « Histoire-géographique-géopolitique » et « Humanités, littérature & philosophie ».
Au titre de la première Épreuve commune de contrôle continu (E3C1), Camille a obtenu une note en LVA, en LVB et en histoire-géographie ; mais elle n’a pas obtenu de notes en Enseignement scientifique et en EPS qui, bien que relevant du tronc commun, ne devaient être évalués par une épreuve ponctuelle qu’à la fin de l’année de Première.
Suite aux décisions ministérielles, Camille ne passera pas la deuxième Épreuve commune de contrôle continu (E3C2) ; la note qu’elle obtiendra en LVA, en LVB et en histoire-géographie sera la moyenne de la note qu’elle a obtenue lors de l’E3C1 et de la note qu’elle obtiendra en Terminale lors de l’E3C3.
Pour l’Enseignement scientifique et l’EPS, l’épreuve finale de Première est remplacée par le contrôle continu ; dans ces deux matières la note de Camille sera équivalente à la moyenne des notes des trois trimestres de Première mais les notes obtenues au cours du troisième trimestre seront prises en compte avec bienveillance.
Pour le Français, l’épreuve écrite du baccalauréat est remplacée par le contrôle continu ; la note de Camille sera équivalente à la moyenne des notes des trois trimestres de Première mais les notes obtenues pendant la durée du confinement ne seront pas prises en compte ; quant à l’épreuve orale, qui constitue donc une formidable exception au principe général, la note de Camille sera celle que lui donnera l’examinateur, si cette épreuve est bel et bien conservée.
Pour la spécialité que Camille a choisi d’abandonner, l’épreuve finale de Première est remplacée par le contrôle continu ; sa note sera équivalente à la moyenne des notes des trois trimestres de Première mais, à la différence de l’épreuve écrite de Français, les notes obtenues au cours du troisième trimestre seront prises en compte avec bienveillance.
C’est-à-dire que, pour chacune des modalités du nouveau baccalauréat dont Camille a eu toutes les peines du monde à saisir les détails au premier trimestre de son année de Première, correspond désormais un calcul différencié qui engendre une véritable obscurité arithmétique et, il faut bien le dire, un véritable flottement dans les pratiques des enseignants qui interprètent le principe général selon leurs logiques propres et leurs intérêts respectifs.
• Sujet. – Imaginons donc que Camille a eu 9 à l’E3C1 d’histoire-géographie, 13 à l’E3C1 de LVA, 12 à l’E3C1 de LVB ; qu’en EPS sa moyenne annuelle est pour l’instant de 14,1 ; qu’en Enseignement scientifique sa moyenne annuelle est pour l’instant de 6,3 ; qu’en Histoire-géographie-géopolitique qui est la spécialité qu’elle a choisi d’abandonner sa moyenne annuelle est pour l’instant de 8,5 ; qu’en Français sa moyenne annuelle est pour l’instant de 11,3 ; supposons par ailleurs que sa note à l’oral de Français sera égale à sa moyenne annuelle en Français, plus ou moins 10 % ; que ses notes d’E3C3 seront égales aux notes qu’elle a obtenues aux E3C1, plus ou moins 10% ; supposons enfin que dans les deux spécialités qu’elle a choisi de conserver ses moyennes annuelles sont respectivement de 12,6 et de 10,9.
• Question. – Quelle est la probabilité pour que Camille, à la fin de son année de Première, soit en position favorable pour obtenir le baccalauréat ?
• Modalités. – Vous avez quatre heures. L’usage du dictionnaire est interdit ; l’usage de la calculatrice est autorisé, à condition qu’elle soit mise en mode examen.

Julien de Kerviler

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Julien de Kerviler
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