Journée d’étude sur l’enseignement de la langue française le 5 juin 2019

(Re)lier, connecter, ponctuer :
des stratégies pour apprendre à mieux lire et mieux écrire

L’ÉSPÉ de Paris  et l’Université Paris-Descartes (laboratoire Éducation, Discours, Apprentissages) organisent le 5 juin 2019 une jourée d’étude à l’ÉSPÉ de Paris, 10, rue Molitor, Paris 16e.

Programme


• 9 h : Ouverture de la journée par Marie Berthelier (IA-IPR, Paris).
Présentation de la journée : Olivia Lewi et Blandine Longhi (ÉSPÉ de Paris).
• 9 h 30 : Didier Samain (ÉSPÉ de Paris) : « Métalange vs stratégies langagières. Remarques sur une fiction didactique ».
• 10 h : Pierre-Yves Testenoire (ÉSPÉ de Paris) : « Ponctuation et supports d’écriture dans le cadre scolaire : problèmes de langue et d’écriture ».
• 11 h : Jacques David (Université de Cergy-Pontoise & ÉSPÉ de l’académie de Versailles) : « Apprendre à connecter et/ou segmenter son texte en CE1 et CE2 ».
• 11 h 30 : Marie-Laure Elalouf (Université de Cergy-Pontoise) : « Corriger la ponctuation ou faire expliciter les connexions : enjeux d’une pause métalinguistique en production d’écrit ».
• 14 h : Myriam Bras et Véronique Paolacci (ÉSPÉ de Toulouse) : « Analyses des textes d’élèves pour envisager autrement leur évaluation. Approche de la cohésion et de la cohérence des textes narratifs d’élèves de fin de primaire et de collège ».
•14 h 30 : Tatiana Taous (ÉSPÉ de Nice, Université Nice Sophia Antipolis) : « Les connexions par relatives. Un foyer d’analyses pour le développement des compétences métalinguistiques d’ordre syntaxique ».
• 15 h 00 : Marie Collombel et Émilie Deschelette (Université Paris-Descartes) : « en quête du sens : des indices linguistiques aux stratégies d’inférence. Connexions et reprises textuelles ».
• 15 h 30 : Olivia Lewi et Blandine Longhi (ÉSPÉ de Paris) : « Du sens à la syntaxe : comment construire un apprentissage explicite de la ponctuation ? Réflexions sur une expérimentation menée en cycles 3 et 4 .»
• 16 h 00 : Clôture de la journée par Émilie Deschelette.
Contacts : olivia.lewi@espe-paris.fr ; blandine.longhi@espe-paris.fr.
• Entrée libre. Merci de vous munir de votre carte professionnelle ou de vous inscrire sur le lien suivant : https://doodle.com/poll/3vxqrac2zvf2mqqw

RÉSUMÉS DES INTERVENTIONS

Analyses des textes d’élèves
pour envisager autrement leur évaluation.

Approche de la cohésion et de la cohérence des textes narratifs
d’élèves de fin de primaire et de collège
Myriam Bras & Véronique Paolacci
(CLLE-ERSS, UMR 5263 UT2J, CNRS et ÉSPÉ DE Toulouse)

Les enseignants mais aussi les chercheurs s’interrogent sur la manière d’appréhender au plus juste les écrits non normés que sont les écrits d’élèves. Comment rendre compte de la complexité de ces écrits qui témoignent, à différents niveaux du texte, de compétences rédactionnelles en voie d’acquisition ? Quels rapports à la norme est-il souhaitable de développer pour évaluer les textes d’apprenants ? Comment décrire les écarts à la norme pour mieux guider la réécriture de ces écrits (Chabanne et Bucheton, 2002) ?
Les textes analysés pour la communication sont issus du corpus RESOLCO constitué par l’équipe toulousaine du laboratoire CLLE-ERSS, un corpus récolté dans des classes de cycle 3 de primaire et des classes de collège (Garcia-Debanc et Bras, 2016 ; Garcia-Debanc et al. 2017). Les textes sont des textes narratifs répondant à une contrainte d’écriture précise : il s’agit d’inclure dans le récit trois phrases imposant des contraintes relativement à la cohésion du discours. L’objectif global de l’équipe toulousaine est de contribuer à une cartographie des apprentissages, il est actuellement mené dans le cadre du projet Ecalm financé par l’Agence nationale de la Recherche et dirigé par Claire Doquet.
Notre intervention s’articulera en deux temps.
Dans le premier temps, Véronique Paolacci présentera une étude interrogeant la segmentation en phrases des textes observés. Nous serons attentives aux usages non seulement de la ponctuation (David et al., 2014) mais aussi des connecteurs ainsi que des cadratifs (Charolles et al., 2005) en ayant pour but de décrire les différentes images de la phrase qui sont illustrées dans les récits du corpus (Paolacci & Rossi-Gensane, 2012, 2014). Nous ferons appel à la « phrase syntaxique » (définie par un pivot) que nous contrasterons à la phrase graphique (définie par des marques de ponctuation forte). La phrase dite « syntaxique » sera présentée comme un étalon commode pour appréhender les textes d’apprenants en cours d’apprentissages.
Dans le second temps de la présentation, à partir de la même sélection de textes, Myriam Bras s’intéressera à la cohérence des productions d’élèves. Elle aura recours à une théorie de l’interface sémantique-pragmatique, la Segmented Discourse Representation Theory (Asher et Lascarides 2003) qui définit de façon formelle ce qu’est un discours cohérent et offre une méthode opératoire de construction de représentations du discours articulées par des relations rhétoriques. Cette théorie, utilisée jusque-là pour analyser des textes d’experts pouvant être généralement qualifiés de textes « très cohérents », est mise à l’épreuve sur des textes d’apprenants.
Il s’agit de mettre au jour les données et les mécanismes à l’œuvre dans l’interprétation de discours dont la cohérence, en tant que propriété de la réception des discours (Charolles 1995), varie d’un scripteur à l’autre, et évolue tout au long de la scolarité. Nous présenterons une analyse comparative de la structure de textes d’élèves de CE2, 6e et 3e (fin de chacun des cycles 2, 3 et 4) et illustrerons la capacité explicative de la théorie face à divers types d’incohérence et à une structure globale des textes plus ou moins complexe.
Dans chaque intervention, nous interrogerons la progressivité des apprentissages relativement à la compétence rédactionnelle des élèves et à la cohérence des textes produits. Nous conclurons notre propos par des pistes didactiques sur les traductions possibles de nos conclusions en indices d’aides à la réécriture.

Apprendre à connecter et/ou segmenter son texte
en CE1 et CE2

Jacques David (Université de Cergy-Pontoise
& ÉSPÉ de l’académie de Versailles ; Laboratoire AGORA (EA 7392) ; Laboratoire CLESTHIA (EA 7345)

À partir d’un double corpus comprenant les textes d’élèves de CE1 et CM2 et les explications métagraphiques énoncées complémentairement, nous proposons une étude des liens souvent concurrentiels entre procédés de connexion et de segmentation.
Il nous semble en effet important de montrer comment de jeunes élèves parviennent ou non à organiser leurs textes (essentiellement des récits de fiction) en recourant à des procédures linguistiques qui évoluent entre des logiques discursives de connexion-articulation vs de segmentation-ponctuation. Nous analyserons ainsi la diversité, la fonctionnalité et la qualité des connecteurs (temporels et/ou logiques) par rapport à celles des marques de ponctuation (du type point-majuscule), quand ils tentent d’articuler les parties de leurs textes et/ou de les délimiter.
Placés en situation de révision, nous montrerons si et comment ces apprentis rédacteurs appréhendent la cohérence narrative des textes produits, en lien avec des opérations de cohésion plus ou moins explicitement enseignées.

Corriger la ponctuation ou faire expliciter les connexions :
enjeux d’une pause métalinguistique en production d’écrit
Marie-Laure Elalouf (Université de Cergy-Pontoise ; ÉMA, ÉA 4507)

Pour un élève, une chose est d’observer la ponctuation des textes, une autre est de faire des choix au cours du processus d’écriture. Ceux-ci peuvent s’écarter des attentes normatives et toutefois participer, avec d’autres éléments linguistiques, à la structuration d’un texte en devenir. Comment l’enseignant peut-il s’appuyer sur ces indices pour permettre aux élèves d’expliciter les connexions avant une réécriture ?
À partir de l’analyse de textes intermédiaires recueillis du CP au lycée, nous essaierons de montrer les formes que peut prendre cette réflexion métalinguistique.

Métalangue vs. stratégies langagières.
Remarques sur une fiction didactique

Didier Samain (ÉSPÉ de Paris,

CNRS UMR 7597 « Histoire des Théories Linguistiques »)

Les consignes officielles invitent les enseignants à privilégier les démarches inductives. En cours de français, les élèves sont de la sorte censés acquérir progressivement une attitude réflexive à l’égard de leur propres productions et de la langue en général.
Conçues loin du terrain, ces recommandations se heurtent à la réalité : en règle générale, les élèves ne découvrent rien qui ne leur ait été suggéré. Mais ce n’est pas tout, l’observation montre que les stratégies d’interprétation et de production des messages, y compris visuels, ne font généralement pas appel à une compréhension des structures, mais à des indices lexicaux associés à des clichés langagiers et culturels. Ce fonctionnement est normal, c’est celui de tout locuteur en situation ordinaire.
On oublie parfois que les catégories grammaticales ne sont nullement des images fidèles du fonctionnement cognitif mais de simples artefacts qui ont du reste varié au fil du temps, ce qui conduit à négliger ce hiatus entre stratégies spontanées et métalangage institué. Alors que la grammaire oppose par exemple le plan du mot et celui de la syntaxe, les paliers naturels tendent plutôt à séparer, d’un côté, des séquences courtes, de l’ordre du syntagme ou de la phrase simple, généralement corrélées à des automatismes syntaxiques, et de l’autre, des séquences plus longues, dont la dimension excède généralement les capacités analytiques des élèves. L’articulation entre les séquences courtes – où s’opèrent les « connexions » – est une zone de fragilité dans la construction des énoncés.
L’enseignement de la langue rencontre donc ici une difficulté plus générale, liée au fonctionnement même du langage. Si, en l’occurrence, stratégies épilinguistiques et savoirs métalinguistiques sont hétérogènes, et si les modèles descriptifs ne sont pas universels (contrairement par exemple aux structures narratives), il ne faut pas s’attendre à ce qu’une démarche réflexive suffise à les initier. Ces phénomènes seront illustrés de fragments de séances effectuées par des enseignants de terrain et quelques pistes de remédiation seront proposées en conclusion.

Les connexions par relatives. Un foyer d’analyses
pour le développement
des compétences métalinguistiques
d’ordre syntaxique
Tatiana Taous (ÉSPÉ Université Nice Sophia Antipolis)

Souvent appréhendée, depuis`Tesnière, comme une expansion nominale, commutable avec l’épithète liée et le complément du nom dans une logique paradigmatique (Tesnière 1959 : 364, 670 ; Arrivé 1969 : 39-40 ; Roubaud 2014 : 136), la proposition subordonnée relative est souvent décrite sémantiquement comme l’une des trois possibilités permettant de réduire l’extension d’un nom et ainsi, de le caractériser (pour la nuance, voir Laparra 1995 : 62). Toutefois, réinscrite dans une logique syntagmatique, la mise en relative permet de connecter une proposition A et une proposition B à partir d’un élément en facteur commun (nœud) qui peut éventuellement occuper deux fonctions syntaxiques différentes dans les deux propositions. La difficulté pour les locuteurs ou scripteurs est alors de sélectionner le bon morphème subordonnant opérant la connexion, puisque, pour être grammaticalement correcte, cette mise en relative nécessite la maîtrise de compétences syntaxiques en matière de rection verbale.
La connexion par relative que nous envisageons ici se situe sur le plan de la « cohérence textuelle » – ou « cohésion » – via les chaînes d’anaphores et se distingue donc du relatif de liaison des textes antiques et classiques qui jouait très souvent le rôle de connecteur logique travaillant à la « cohérence conceptuelle » (Gross & Prandi 2004 : 10, note 1).
La question de la relative pourrait, nous semble-t-il, constituer un terrain d’analyse fécond contribuant au développement de compétences réflexives et métalinguistiques sur la langue. Les maladresses syntaxiques relevées dans les copies d’élèves ou d’étudiants se cristallisent autour de trois grands phénomènes :
1) Peu de relatives (Laparra 1995 : 60-61) et tendance à juxtaposer ou à employer des connecteurs traditionnels (avec un effet souvent peu naturel et très scolaire). Les écrits argumentatifs recourent rarement aux adverbes ainsi et alors qui s’inscriraient plus heureusement dans le flux de l’énoncé (Fayol 1986 : 112).
2) Présence de relatives mais…
– peu de diversification dans la sélection de l’opérateur de connexion (Laparra 1995 : 62 ; Roubaud 2014 : 89-90) ;
– sélection du mauvais morphème, conduisant l’énoncé à l’agrammaticalité (Laparra 1995 : 62-63) ;
– absence de proposition principale : l’énoncé reste en suspens, en attente de complétude syntaxique (Cappeau 2000 : 79 ; Masseron 2011 : 154).
3) Plus généralement, des problèmes dans la sélection des prépositions qui conduisent à des énoncés ne répondant pas aux exigences de la « compétence » linguistique (Chomsky 1965 : 3-14).
Après avoir illustré, à partir de productions écrites ou orales, l’idée que la mise en relative pouvait constituer un nœud problématique dans les phénomènes de connexion (qu’elle soit absente ou qu’elle manifeste une performance erronée), nous proposerons quelques supports permettant de travailler plus spécifiquement sur les rections syntaxiques et conséquemment, sur les stratégies à développer pour sélectionner le bon pronom, opérateur de connexion.
• Organisation : Groupe de recherche-action ManDeLAb (Laboratoire de manipulation de la langue). Avec le soutien du GIS de l’ÉSPÉ de Paris et du Laboratoire Éducation, Discours, Apprentissages (EDA – EA 4071, Université Paris-Descartes).
• Contacts : olivia.lewi@espe-paris.fr ; blandine.longhi@espe-paris.fr
• Entrée libre. Merci de vous munir de votre carte professionnelle ou de vous inscrire sur le lien suivant : https://doodle.com/poll/3vxqrac2zvf2mqqw

l'École des lettres
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